Sissi Schilling

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«J’ai ces taches, et je les assume».


Cela fait plus de 30 ans que Sissi Schilling souffre de vitiligo, cette maladie de peau chronique. Le récit que cette dame de 52 ans fait de son parcours avec cette maladie est très parlant.

 

De Sara Probst


Sissi Schilling passe la main à la racine de ses cheveux, puis descend vers le cou. «J’ai quelques taches par là, et surtout ici, sur le cou. Mais comme j’ai la peau très claire, cela ne se voit pas beaucoup», raconte-t-elle. Par contre, sur le dos de sa main, le symptôme caractéristique de la maladie est bien visible: une zone blanche bien délimitée se détache nettement de la peau sombre de l’avant-bras. Cette maladie entraîne une dépigmentation de la peau qui se manifeste par une décoloration. Il se forme des zones qui restent blanches, délimitées nettement ou irrégulièrement. La cause de la maladie n'est pas claire, mais on suppose qu’il existe une prédisposition héréditaire au vitiligo. Le stress, les irritations de la peau ou un coup de soleil peuvent aussi favoriser son apparition. Le vitiligo est inguérissable; il existe diverses possibilités de traitement qui freinent son avancée et pourraient favoriser la repigmentation des zones blanches - des photothérapies, ou des pommades et des crèmes contenant des substances actives comme la cortisone.


Le vitiligo n'est pas dangereux, mais il peut être très éprouvant pour les personnes qui en sont atteintes. Beaucoup se résignent à cacher les taches avec du «camouflage» (du maquillage couvrant). Pour Sissi Schilling, il n’en a jamais été question: «J’ai ces taches, et je les assume», déclare-t-elle en haussant les épaules.


«Pas de panique»
Tels furent les mots de la dermatologue lors du diagnostic de la maladie. Âgée de 18 ans à l’époque, elle ne savait pas à quoi attribuer ces symptômes. «J’ai soudain remarqué des taches blanches entre le nombril et plus bas» raconte-t-elle. «J’ai d'abord pensé à de l’eczéma, car j’en avais souvent eu étant enfant. Mais ces taches ne grattaient pas. La doctoresse a tout de suite été catégorique: il s’agissait bel et bien de vitiligo». Sissi Schilling n'avait encore jamais entendu parler de cette maladie, elle était la seule de son entourage à en être atteinte. A cet âge, encore adolescente, elle a trouvé difficile d’assumer ces taches: par rapport aux critères de beauté idéale de l’époque, longtemps elle s’est tout simplement trouvée «pas  belle». Comme elle avait déjà un ami à l’époque, au moins une chose n’a pas été difficiles: «Je n’ai pas eu besoin de me demander ce qui se passerait quand un partenaire verrait ces taches pour la première fois».


Protection solaire, un devoir absolu
Au cours des ans, de nouvelles taches apparurent - sur le dos de la main, le cou et le ventre, les avant-bras et le dos. «Comme j’ai une peau claire, en général ce n'est qu’au printemps que je remarque les nouvelles taches - quand la peau saine a pris un peu de couleur avec le soleil», dit-elle en riant. C’est la raison pour laquelle elle est très prudente: dès que le soleil se montre, la crème solaire à indice 50 est un must absolu, car les taches blanches doivent être protégées contre les rayons UV. En été, elle porte aussi souvent des manches longues, des pantalons longs et des chaussures fermées. Et aussi en permanence un immense chapeau de soleil qui protège le visage et le cou. «De temps en temps, je remarque des regards goguenards à cause du chapeau. Mais je m’y suis habituée», dit-elle.  


Se présenter avec assurance, avec son vitiligo.
 Ces cinq à dix dernières années, moins de nouvelles taches sont apparues, raconte Sissi Schilling. C’est peut-être aussi dû au fait qu’elle en général plus tranquille et moins stressée. Ce qui ne veut pas dire qu’elle ne vit pas toujours une vie active: en plus de son travail d’administratrice de biens immobiliers, elle fait beaucoup de sport et chante dans un chœur d’église depuis quelques années. Cela fait 8 ans qu’elle vit dans la région genevoise avec son partenaire et leur fille de 8 ans. Ce qui fait qu’actuellement, quand elle parle de vitiligo, c’est surtout en français - mais en réalité le sujet est rarement abordé. « Mon entourage est discret à ce propos, et les personnes étrangères semblent ne pas oser me poser des questions directement.»


Il y a bien sûr des préjugés: ainsi, il y a de nombreuses années, elle a serré la main d’un homme qui lui a demandé si les taches étaient contagieuses. Mais en général elle a l’impression que les temps ont changé à ce propos. «Il y a 30 ans, on ne voyait tout simplement pas de personnes atteintes de vitiligo. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, Des mannequins atteintes de vitiligo ont fait connaître cette maladie. Cela m’a énormément aidée», dit-elle. Récemment, dans le cadre d'un reportage, elle est tombée sur des photos de la photographe hollandaise Elisabeth van Aalderen, qui montrent des personnes du monde entier atteintes de vitiligo. «J’ai trouvé ces photos tellement belles. C’est fantastique de voir des gens ainsi couverts de taches s’afficher de cette manière».

 

L’article provient de l’édition de juin du journal APROPOS de TopPharm, Sara Probst en est l’auteure, et Christoph Läser a fait les photographies.